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samedi 29 novembre 2014

Les croupiers ne sont pas des robots mais des avatars !

Novembre 2014 aura été pour moi un mois relativement important. Non pas en raison de performances pokeristiques fabuleuses : de ce côté-là, c'est plutôt calme en ce moment (si l'on excepte ma victoire à la Paris Poker Ligue du PMU). Non pas en raison de l'avènement du nouveau Champion du monde Martin Jacobson. Mais bien parce qu'un grave incident est survenu lors de l'épreuve live du Barrière Poker Tour d'Enghien qui a eu lieu lors du premier week-end du mois, et cet épisode sombre appelle quelques commentaires et réflexions de ma part.

Un joueur du nom de Hicham Hilmi, pourvu d'un palmarès étoffé et notamment vainqueur d'une épreuve majeure du circuit hexagonal en 2013, a été disqualifié après avoir été pris en flagrant délit de triche. Il lui a été reproché de pratiquer de façon récurrente la collusion passive (une sorte d'entente tacite avec ses amis à la table de poker afin qu'ils ne s'éliminent pas entre eux), mais aussi et surtout d'avoir mis au point un stratagème avec un croupier afin que ce dernier lui distribue des paires d'as plus souvent qu'à son tour grâce à quelques tours de passe-passe dont les meilleurs manipulateurs de cartes ont le secret. La directrice du Barrière Poker Tour a procédé à la disqualification du joueur après visionnage des bandes vidéo en compagnie d'agents de la Police des Jeux.

Cette histoire me touche, parce que des étapes du Barrière Poker Tour, j'en ai disputées deux, ces derniers mois, à Bordeaux et à Toulouse. Mais aussi et surtout parce que ce croupier manifestement véreux de mèche avec le joueur incriminé, il se trouve malheureusement que je le connais pour l'avoir croisé récemment à l'une des tables de poker auxquelles j'ai joué. Si ma mémoire ne me joue pas des tours, c'était lors du tournoi DreamStack à 500 Euros du Cercle Clichy Montmartre qui avait lieu le dernier week-end de septembre... et rien ne me garantit dès lors qu'il n'ait pas procédé à quelques uns de ses tours de passe-passe à ma propre table. Voici le croupier incriminé : il s'appelle Arnaud H. A ce stade de l'enquête, il semblerait que ce croupier-magicien ait favorisé par le passé d'autres joueurs que Hicham Hilmi, arrondissant ainsi ses fins de mois en percevant une commission sur les gains du joueur ainsi favorisé ayant pu obtenir des gains conséquents par ce biais. L'affaire étant actuellement en cours d'instruction par la police, on est loin d'en connaitre tous les tenants et aboutissants, ainsi que les éventuelles ramifications. On se gardera de tout jugement hâtif. Quoi qu'il en soit, cet épisode sombre pour le poker appelle toutefois dès à présent quelques commentaires.

Tout d'abord, le poker est un jeu qui brasse de l'argent et qui confère une certaine gloire à ceux qui savent tirer leur épingle du jeu. Or toute activité humaine générant argent et prestige occasionne automatiquement l'émergence d'une part de fraude. C'est dans la nature humaine : il y a toujours une frange de brebis galeuses. A ce titre, le poker n'échappe pas à cette règle malédiction. D'autant que les croupiers sont très chichement rétribués par les casinos et cercles de jeux qui les emploient. Et la situation ne va pas en s'améliorant lorsque l'on sait que coup sur coup, deux des trois cercles de jeux parisiens ont fait l'objet d'une descente de police et d'une fermeture administrative ces dernières semaines : l'Aviation Club de France (ACF) et le Cercle Cadet. Au total, ce sont actuellement près de 300 personnes qui se retrouvent de ce fait au chômage, dont une bonne partie de croupiers. On est en droit de penser que certaines turpitudes sont commises de-ci de-là dans le monde du poker live, et pas qu'au niveau des seuls croupiers, malheureusement. Dans de telles conditions, en tant que joueur, quel que soit son propre niveau de compétence, il ne faut jamais oublier que la triche existe à des strates différentes et à des degrés divers, les strates les plus grossières se trouvant dans la collusion entre joueurs, mais aussi dans le marquage des cartes et lors de la donne par le croupier. 

Le statut de joueur de poker est extraordinairement précaire, et s'apparente à une caravelle traversant les océans au XVIème siècle : il est relativement ardu d'arriver à bon port les cales regorgeant de richesses. Il faut un capitaine compétent et expérimenté, pourvu d'une nef solide pour pouvoir tout à la fois éviter les écueils, louvoyer efficacement contre les pirates et corsaires, tirer le maximum de son équipage tout en évitant les mutineries, et résister aux avaries provoquées par les tempêtes les plus violentes. Loin de moi l'envie de plaindre les joueurs professionnels ou semi-professionnels qui écument le circuit, mais entre les lourdes ponctions fiscales pour les résidents fiscaux français, la triche occasionnelle que l'on peut être amené à subir, les coups de malchance à répétition à même de miner le moral, et enfin la hausse du niveau moyen des joueurs adverses, rien n'est facile lorsque l'on est un joueur français en 2014. Car l'âge d'or du poker live est révolu. C'est pourquoi, à un moment donné, dans un contexte rendu difficile par la conjoncture et la concurrence, la tentation existe d'unir ses forces entre gens médiocres pour ne pas sombrer. Entre le joueur déboussolé et le croupier opportuniste. A ce moment là, la bascule vers l'illégalité se fait sans espoir de retour. Et c'est ainsi que se constituent les frégates de corsaires qui partent à l'assaut des navires marchands. Un croupier jeune et trop modestement payé au regard de ses appétences et de son train de vie a cédé aux sirènes d'un a(r)mateur peu scrupuleux. A titre personnel, je suis bien entendu partisan de la plus extrême sévérité envers les coupables lorsqu'ils se font pincer. Mais je peux comprendre tous ces comportements... car ils ne sont que trop humains.

Les croupiers des casinos et cercles de jeux ne sont pas des robots, mais des gens profondément humains. Avec tous les travers et toutes les richesses que le mot "humains" implique. Au quotidien, ils sont confrontés à un phénomène qui m'irrite profondément et qui fait que je n'apprécie pas le live : le manque d'empathie et de respect de la part des joueurs envers ceux qui les entourent. Devoir endurer cela à  longueur de journée est particulièrement pénible. En ce sens, être croupier, c'est vivre au quotidien dans une certaine frustration. Frustration de ne pas participer aux coups joués. Mais aussi frustration de n'avoir aucune reconnaissance pour le travail de l'ombre accompli inlassablement pour le plaisir d'autrui.

De par les phénomènes de rotation en tournoi, les croupiers restent rarement plus d'une heure à une table de poker. Et je constate que rares sont les joueurs à ne serait-ce qu'accorder un modeste "bonjour" aux croupiers lors de leur arrivée à une table. Personnellement, je mets un point d'honneur à systématiquement réserver un petit bonjour ou tout autre mot de bienvenue au croupier lorsqu'il s'installe à ma table. Si possible avec un petit sourire, si tant est qu'il consente à me regarder au passage. Parce que je suis poli, courtois, civilisé. Parce que je suis positif, que je crois en la force des ondes magnétiques et en l'existence du karma. Souris au croupier et les cartes qu'il te distribuera te souriront ! Telle est ma devise. Et il n'est ici nulle question de triche suggérée ou délibérée, mais bien de transmission empathique d'ondes positives, à même de favoriser l'intercession du Dieu du Poker au moment de la véritable ordalie par les cartes qui se déroule à la table.

la belle croupière inconnue... quelqu'un ici saurait me dire son nom SVP ?
Car les croupiers ne sont autres que des avatars de Dame chance et de la Guigne, venus provisoirement prendre possession de leurs corps pour distribuer par leur truchement les cartes de la destinée aux joueurs assis à la table. Et en matière de chance et de malchance, ma doctrine personnelle consiste à toujours sourire et à accepter les coups du sort, favorables comme défavorables. Car ce sont ces mêmes coups du sort qui contribuent à forger le destin des joueurs, quitte à parfois les secouer sans ménagement. Autant accepter tout ceci et l'intérioriser de façon positive : tour à tour cruel, ironique ou merveilleux, je crois au destin. Je crois en cette force invisible et immanente, qui influe sur nos actes et leurs conséquences. Je crois au Dieu du Poker. Et de surcroît, cerise sur le gâteau de la destinée, il existe des croupiers très chouettes en sus d'être intègres et compétents. La preuve en images avec cette éblouissante croupière au prénom inconnu (et qui ressemble furieusement à mon ancienne petite-amie russe Anna) rencontrée y a un an lors de l'OM Poker Live organisé par Bwin au Stade Vélodrome de Marseille. 

Ceux qui trichent pour obtenir des paires d'as sont des faibles n'ayant rien compris à l'ordre cosmique des choses. Nous sommes le 29 novembre 2014, et si mon destin est de parvenir à devenir quelqu'un dans le Landernau du poker, je recroiserai un jour ma belle croupière inconnue. Et ce jour-là, elle me distribuera une paire d'as. Non pas parce qu'elle aura frauduleusement manipulé les cartes. Mais parce que la mécanique secrète de l'univers en aura décidé ainsi. C'est écrit.


P.S. : si quelqu'un connaît le nom de cette jeune femme, je suis preneur...






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