Translate

lundi 28 février 2022

Microdécos !

De la même manière que c'est lorsque le bonheur nous fuit que l'on se rend compte qu'il était là précédemment, je crois que l'on ne mesure pas la chance qui est la notre lorsque l'on dispose d'un connexion internet stable et d'un équipement informatique parfaitement fonctionnel pour disputer ses tournois de poker en ligne, car il suffit d'un petit grain de sable dans la mécanique pour que tout s'enraye. Pas seulement sur le plan technologique, mais également sur le plan du mental.

Je conserve un souvenir nostalgique bien que parfois pénible de la période lointaine où mon ordinateur - en raison de drivers mal installés - était quasi quotidiennement victime d'une erreur fatale par session, avec écran bleu et redémarrage intempestif générant un black out poker de 3 à 4 minutes, voire davantage. Je me dis que j'y ai laissé pas mal de plumes, quand j'y repense. Puis, un joueur communautaire bienveillant avec lequel j'avais tissé quelques liens m'a miraculeusement dépanné à distance, de telle sorte que ce désagrément a subitement cessé, me permettant de rentrer dans le monde merveilleux de la normalité. Ma connexion Free était à l'époque extrêmement fiable, à tel point que j'en ai oublié ce que les galères technologiques pouvaient être.

A l'occasion d'un déménagement qui ne s'est pas passé comme prévu, puisque le câblage internet connaissait quelques imperfections et/ou malfaçons,  j'ai subi une piqûre de rappel : le joueur de poker en ligne ne peut rien faire lorsque la technologie s'avère réfractaire. Pendant de longues semaines, j'ai donc vécu avec sérénité une sorte de black out qui m'a tenu éloigné des tables en ayant pour effet de diminuer mon envie de jouer. J'ai cru que cette mise en friche me permettrait de régénérer mon envie et mes ressources mentales. Mais force est de constater que cela n'aura pas été le cas dans les faits. Lorsque la fibre optique a enfin été fonctionnelle dans mon appartement, mon implication poker avait fortement diminué. Mon désir d'en découdre avec l'adversité et la variance avait diminué. Ma passion avait diminué. Ma patience à l'encontre de la mauvaise fortune ayant également diminué, le boost mental escompté n'a pas eu lieu. Et vu la situation actuelle, le retour à un ciel sans nuages n'est peut-être pas pour tout de suite.

Il y a peu, j'ai ici relaté ma mésaventure survenue lors d'une de mes sessions nocturnes, suite à une longue déconnexion survenue en toute fin de soirée me privant de potentiels gains financiers alors que la victoire me tendait les bras. Depuis lors, ayant goûté malgré moi à cette coupe d'amertume, je trempe mes lèvres dans le poker en ligne nettement plus précautionneusement, apeuré par les déconnexions intempestives en réduisant le nombre de tables jouées par session, par peur du vide. Car ces derniers jours j'ai été à plusieurs reprises victimes de micro-déconnexions. Oh, rien à voir avec celle de la fois précédente. Il s'agit de coupures qui ne durent guère plus d'une vingtaine de secondes, mais cela suffit à générer une sensation de gêne et d'inconfort.

Plus jeune, j'ai fait pas mal de cyclisme, à un niveau tout à fait honorable. J'aimais tout particulièrement lorsque le relief était accidenté : la souffrance d'une montée pénible avec des forts pourcentages était toujours atténuée par le plaisir de l'effort du moment mais aussi et surtout par la promesse de la récompense occasionnée par la descente à venir. D'autant que j'avais une très bonne science des trajectoires lorsqu'il s'agissait de descentes que je dévalais à toutes berzingues. Une inconscience, même plutôt qu'une science, lorsque je repense à la prise de risques que cela pouvait parfois présenter. Jusqu'au jour où je me suis mangé la gamelle de ma vie, alors que je dévalais à grande vitesse dans un froid glacial un col de haute-montage au Pérou à plus de 4.500 mètres d'altitude qui m'a meurtri dans ma chair et dans mes os et qui a nécessité un rapatriement sanitaire via Europe Assistance. Depuis lors, s'il m'est advenu de refaire du vélo à petite dose, plus jamais je n'ai retrouvé le sens inné des trajectoires en descente et je conserve toujours par ailleurs le frein sur les cocottes : quand bien même je voudrais retrouver ma fluidité d'autant je n'y parviens plus. Toutes proportions gardées, c'est un peu le même état d'esprit qui m'habite en ce moment s'agissant de mes sessions de poker en ligne. La peur de la chute. Car outre la technique, ce qui fait souvent la différence au poker, c'est bien le mental. Pour obtenir des résultats, il faut être dans un état de sérénité difficilement conciliable avec l'incertitude liée à la survenance de micro-déconnexions comme c'est actuellement le cas. Chaque micro-déconnexion que je subis amoindrit mon bien-être aux tables et fissure ma confiance. La peur de perdre un gros pot pour des raisons "technologiques" a désormais pris le dessus sur mon plaisir de jouer. Difficile de dire combien de temps cela durera, toujours est-il que c'est un épisode assez pénible à vivre... Espérons que tout ceci ne soit bientôt plus qu'un lointain souvenir, lui aussi enrobé de nostalgie.