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lundi 27 avril 2020

Hygiène et santé (3/3) : Las Vegas est un désert !

Las Vegas. La capitale mondiale du poker. La ville de tous les fantasmes. L'évocation de ce seul nom suffit le plus souvent à faire miroiter les yeux de tout joueur qui se respecte. Que ce soit un joueur de cartes, de roulette ou de dés. Oui mais voilà, Las Vegas est un colosse aux pieds d'argile, une ville majestueuse érigée dans un environnement hostile dont la seule vocation est de distraire le plus grand nombre en leur faisant oublier le temps qui passe et leur argent qui s'évapore dans un climat d'extrême sécheresse. Or, en ces temps de Coronavirus, se distraire constitue le cadet des soucis des américains, dont le pays est désormais le plus touché par l'épidémie... et les casinos de la ville vidés de leurs touristes pour raison de confinement ont dû licencier à tout va. Idem pour les hôtels. Idem pour à peu près toute l'économie de la ville-mirage : des centaines de milliers de travailleurs au chômage pour une durée indéterminée.

Las Vegas Bd déserté en plein jour.
Las Vegas. Un désert. En passe de devenir une ville-fantôme en ce printemps 2020. Car les fantasmes d'hier ont désormais bel et bien pris des allures de cauchemars. Tout ça à cause d'un petit grain de sable nommé Coronavirus, venu gripper la mécanique bien huilée de cette oasis ludique, de cette perle de luxure. Alors Las Vegas n'est plus désormais qu'une forêt de béton sans âme, plantée sur un plateau désertique et assoiffé. Des rues désertes dans une ville désertée, tel est le paysage offert par la ville en ce printemps 2020. Avec le confinement imposé et le climat de peur généralisé, c'est toute l'économie locale qui s'est écroulée d'un simple claquement de doigts. Tandis que le gouverneur semble décidé à maintenir un confinement strict le temps qu'il faudra pour juguler l'épidémie de Coronavirus, le maire de la ville trépigne déjà pour que la ville rouvre. Car il sait que la ville joue gros et que chaque seconde perdue constitue un désastre économique dont il sera difficile de se relever. A Vegas encore plus qu'ailleurs la ville dépérit en restant à l'arrêt, privée de ses touristes. Et les néons de la nuit brillent bien, bien moins le soir !

Pour les passionnés de poker, c'est bien évidemment aussi la douche froide : les WSOP - les fameux World Series of Poker - qui devaient se tenir comme tous les ans entre mai et juillet ont été reportés à l'automne. Et même à l'automne il est loin d'être acquis que l'édition 2020 du festival puisse de tenir. La mécanique de qualifications en ligne pour ces WSOP qui démarre habituellement vers mars a été mise en sommeil... Les plateformes en ligne regorgent bien de clients en ces temps de confinement généralisé, mais ne proposent pour le moment pas de satellites qualificatifs pour l'événement, en attente d'y voir un peu plus clair sur les dates. Mais qu'il s'agisse d'un simple report ou d'une annulation à terme, tout ceci ne sera au final qu'un moindre mal à l'échelle de la ville. Car le problème du poker ne constitue qu'une simple goutte d'eau dans la traversée du désert que Las Vegas vient d'entamer.

A ce stade, tous les casinos-hôtels jouent leur survie. Car il y aura des dégâts incommensurables sur le plan économique, bien au-delà des dégâts sanitaires. Les établissements ayant les reins solides parviendront probablement à échapper à l'hécatombe qui s'annonce et qui promet une flopée de faillites commerciales comme la ville n'en a probablement jamais connues jusqu'ici. Mais je suis particulièrement pessimiste, à titre personnel. On entend déjà certes de-ci de-là des rumeurs de réouvertures prochaines de casinos avec masques obligatoires pour tous et espacement des distances entre clients aux tables et autres machines à sous, mais à la vérité tout ceci me parait bien illusoire. Une réouverture dans de telles conditions ne fera bien évidemment pas rêver grand-monde ! Or, Las Vegas ne vibre, ne vit, ne survit que par le rêve et l'émerveillement qu'elle suscite. Dès lors que l'on bascule dans le cauchemar comme c'est le cas actuellement, c'est le réveil brutal qui sera probablement privilégié par le plus grand nombre. L'aéronautique est à l'arrêt pour de nombreux mois et quand bien même le trafic aérien serait rétabli à 100%, les gens ont peur; une peur qui risque de perdurer. Il y a fort à parier que les touristes et badauds ne reviendront pas à Vegas de sitôt (l'hypothèse d'un vaccin-miracle mis sur pied en un temps record n'étant pas la plus probable). Alors la ville est promise à des heures sombres : aujourd'hui ville déserte. Et demain très probablement aussi.

vendredi 17 avril 2020

Hygiène et santé - (2/3) : l'économie du poker bouleversée !

L'arrivée du Coronavirus a chamboulé depuis quelques semaines toute l'économie de la planète poker. Comme partout ailleurs. Concrètement, le confinement qui a été décrété un peu partout sur la planète engendre deux effets principaux très distincts, selon un système de vases communicants : la mise en coma artificiel du poker live, d'une part, et l'irrésistible fièvre dont profite le poker en ligne, d'autre part.

Autour d'une table de poker live, le Coronavirus peut circuler dans des conditions quasiment idéales. Alors que les premières turbulences se faisaient sentir et peu avant que les établissements ne se mettent à annuler tous les événements et festivals poker, certains joueurs célèbres - tel le champion canadien Daniel Negreanu - avaient même tiré la sonnette d'alarme en amont (dès la première quinzaine de mars aux USA) pour que le jeu en live s'arrête immédiatement, tellement les risques de contamination et de propagation apparaissaient comme élevés. On se contentera ici d'évoquer succinctement les vecteurs de contamination les plus évidents, avant de se pencher un peu plus en détail sur l'aspect purement économique.

Les vecteurs de contamination en live sont donc multiples, les joueurs et membres du staff des établissements accueillant des joueurs de poker étant amenés à demeurer statiques plusieurs heures consécutives dans un même espace clos avec des distances de séparation minuscules : 
- la contamination peut survenir via l'incessante circulation des jetons (comme évoqué dans l'article précédent)
- la contamination peut également survenir via la distribution des cartes par le croupier, puisque les joueurs reçoivent deux nouvelles cartes à chaque main, sachant qu'elles ont été manipulées par d'autres joueurs dans les minutes qui précèdent
- un tapis de jeu constitue un parfait nid à microbes, ce n'est un secret pour personne que les miasmes y pullulent ; qu'il soit plastifié, en tissu ou en velours, il y aurait de quoi se hérisser le poil si on se mettait à le scruter au microscope
- la contamination peut également se faire du fait de la promiscuité qui règne aux tables, sachant que le plus souvent une table de poker live accueille entre 7 et 11 personnes et qu'il faut souvent faire attention pour ne pas heurter le coude ou la jambe du voisin
- de façon plus insidieuse mais tout aussi redoutable, la contamination se fera aussi potentiellement via la climatisation, sachant que l'immense majorité des casinos fonctionne en vase clos et que la circulation de l'air dans les espaces de jeu passe par la climatisation plutôt que par l'air naturel en provenance des fenêtres

Le masque de la peur
D'un point de vue économique, les cercles de jeux et les casinos sont donc fermés depuis un mois un peu partout sur la planète, au même titre que les établissements de divertissement apparentés accueillant du public tels que musées, théâtres, salles de spectacle et salles de cinéma. Il y a fort à parier que ces secteurs seront parmi les derniers à bénéficier de la reprise économique une fois le retour à la normale acté par les pouvoirs publics. Car ce n'est pas qu'une question de dates officielles de réouvertures... il faudra aussi encaisser les effets dévastateurs générés par la peur. Le traumatisme est important dans la tête des gens et la méfiance du public perdurera dans de tels lieux tant qu'il n'y aura pas eu éradication totale de la maladie. Certains ne mettront plus les pieds dans ce type d'établissements pendant longtemps. Voire très longtemps. Même avec un masque sur le visage. L'équation est simple. Pas de vaccin, pas de confiance. Pas de confiance, pas de business.

Si j'étais croupier ou employé d'un cercle de jeux, je serais inquiet non seulement à court terme, mais aussi et surtout à moyen terme. D'ailleurs, à propos de croupiers, on signalera que sur le plan micro-écronomique diverses cagnottes de solidarité en ligne de type Leetchi ont même été mises en place dans les jours qui ont suivi la fermeture des établissements et l'instauration du confinement... un élan solidaire insolite et dérisoire de la part des joueurs professionnels et autres réguliers du circuit, du même acabit qu'un garçon sur la plage qui tente de consolider son château de sable dont les fondations sont happés par l'arrivée de la marée qui monte.

Qu'il s'agisse de joueurs réguliers privés de leurs tables de jeux favorites au casino ou dans leur cercle de jeu habituel, de joueurs amateurs devant annuler leurs séance hebdomadaire en club, ou bien de groupes d'amis ne pouvant plus héberger leurs parties habituelles au domicile de l'un deux, il y a des dizaines de milliers - voire des centaines de milliers - de joueurs privés de leur hobby. Faute de caviar, ces gens se sont massivement rabattus sur les oeufs de lompe : le trafic du poker en ligne a tout simplement explosé en l'espace d'un peu plus d'un mois. D'autant qu'il faut encore y ajouter d'autres catégories de joueurs occasionnels, qui ont eux aussi récemment pointé le bout de leur nez sur les tables de poker en ligne : les habituels parieurs sportifs et les oisifs. Les plateformes de poker sur internet étant aussi des plateformes de paris sportifs, l'arrêt brutal des compétitions sportives sur lesquelles parier a certainement conduit quantité de parieurs à devoir reporter leur besoin d'adrénaline vers le poker, à l'image d'un junkie au crack contraint de se rabattre sur la cocaïne suite au brusque démantelement de sa filière habituelle par la police. Pour parachever le tableau, on ajoutera enfin les oisifs confinés, ceux qui ne sont pas habitués à être inactifs et qui cherchent à passer le temps en se divertissant au moins un peu. En additionnant tout ce beau monde, on a tôt fait de comprendre que l'afflux de joueurs aux tables de poker online est actuellement massif et généralisé. C'est bien simple, depuis mes débuts en 2013, je n'ai pas souvenir d'avoir vu autant d'affluence sur les plateformes hexagonales de poker en ligne. Pour autant, et c'est là le paradoxe, les opérateurs de poker en ligne ne se frottent pas totalement les mains : la perte au niveau des paris sportifs est pour eux abyssale et le sursaut lié au poker ne compensera qu'en partie le manque à gagner sur les paris.

On le voit, le monde du poker se retrouve donc complètement chamboulé à cause d'un simple microbe. Comme partout ailleurs. Mais à ceci près qu'il semble acquis que pour le poker ça risque d'être un chamboulement impactant y compris à moyen terme, avec une reprise plus tardive et plus timide du poker en live, tandis que le poker en ligne bénéficie provisoirement d'un coup de fouet inespéré. On est décidément pas au bout de nos peines.