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jeudi 18 septembre 2014

Le trône ou le strapontin ?

Environ trois fois par an, Winamax organise un méga-tournoi en garantissant une dotation totale d'un million d'euros minimum : le Million Event. Et pour être sûr que l'on puisse y déployer du beau jeu avec de la profondeur de tapis malgré l'afflux massif de milliers de joueurs venus y participer, ce tournoi est étalé sur trois jours distincts.

Devant un tel enjeu financier (l'heureux gagnant repartant les poches pleines à craquer avec la bagatelle de 180.000 Euros), il va de soi que le droit d'entrée du Million Event n'est pas donné et qu'il faut débourser 150 euros pour y participer. Une somme certes élevée, mais restant à la portée des bourses des rêveurs. Ce tournoi aiguise aussi l'appétit de joueurs étrangers ambitieux à l'affût des bonnes opportunités et à ce titre intéressés par la possibilité d'aller pêcher dans le bocal des joueurs français au niveau sensiblement plus faible que le leur. Car si les joueurs français online n'ont pas le droit de jouer sur des plateformes étrangères, l'inverse n'est pas vrai.

En temps normal, jamais je n'aurais jamais songé participer à un tournoi au droit d'inscription aussi élevé. Sauf que j'ai eu la bonne idée de convertir un ticket de 5 Euros qui traînait (comme souvent sur mon compte Winamax) en un ticket rutilant pour le tournoi du Million Event. J'ai d'ailleurs littéralement survolé le tournoi qualificatif qui se déroulait dimanche après-midi, juste avant le démarrage du tournoi principal.

Et c'est ainsi que je me suis retrouvé sur la ligne de départ ce dimanche 14 septembre à 20 heures précises pour vivre cet événement particulier. Aucune pression particulière : je n'ai peur de personne, pas même des meilleurs joueurs étrangers, et je sais dans le même temps que la part d'aléas est telle sur un tournoi pareil qu'il est tout bonnement impossible d'en attendre quelque chose de particulier. On joue, et on avise en cours de route. C'est exactement ce que j'ai fait, et je me suis ainsi extirpé de la masse des 7.731 participants lors de la première journée, à la faveur d'un jeu inspiré et solide tout à la fois, dans la droite ligne de ma qualification obtenue dimanche après-midi. La seconde journée s'est malheureusement beaucoup moins bien passée, à la suite d'une malchance terrible lors d'un coup gigantesque préflop (pour un pot total de 50 blindes) peu après avoir atteint le seuil des places payées. Aucun regret : j'avais réussi à piéger mon adversaire (paire de rois vs as dame) et il s'en est tiré grâce à la chance puisqu'il s'agissait d'une rencontre me donnant 70% de chances de doubler mon tapis. Dame Chance a choisi de me bouder à ce moment précis et je ne lui en tiens pas rigueur. Je finis donc prématurément ma course dans le décor en milieu de seconde journée à la 703eme place, avec à la clef une récompense "peau de chagrin" de 202 euros seulement.

A l'heure où je rédige ces lignes, la seconde journée du tournoi touche à sa fin. Les lauréats de la table finale repartiront chacun avec des dizaines de milliers d'euros à l'issue de la troisième et dernière journée du tournoi qui aura lieu ce jeudi 18 septembre. Mais cette expérience a été pour moi l'occasion de me rendre compte que je n'ai absolument pas à rougir de mon niveau de jeu.

Heureusement, il n'y avait pas de système d'alarme...
Me considérant toujours comme un joueur en apprentissage en dépit de quelques performances encourageantes, je demeure complexé à l'idée de disputer les tournois d'envergure. Et pourtant... pourtant, je sais que mon niveau intrinsèque est à présent suffisamment élevé pour pouvoir me frotter aux meilleurs. Lorsque je joue à une table, personne ne me fait peur. Non, ce qui me fait peur, en définitive, c'est de prendre le siège et de m'y engoncer confortablement... Quitte à choisir, je préfère les strapontins. Paradoxal, n'est-ce pas ? D'ailleurs, rédiger cet article m'a permis de me remémorer une anecdote croustillante en matière de siège. Il y a quelques années, en visitant le Sénat avec un questeur tout juste retraité en guise de guide privé, j'avais commis la plus grosse folie de ma vie : m'assoir sur le trône de l'empereur Napoléon Ier l'espace de quelques secondes sous le regard médusé de mes camarades de promotion, pendant que ledit questeur ressassait le bon vieux temps avec le surveillant dans la pièce située juste à côté. Malgré son côté absolument majestueux, je n'avais pas trouvé ce trône confortable du tout. Le trône de Napoléon Ier en bois doré, sculpté par Jacob, était occupé par l'empereur lorsqu'il assistait aux Séances du Sénat.

petit strapontin
Avec le recul ainsi que le poids des années qui commencent à s'égrener, cette anecdote me rappelle que tout au fond de moi se love un destin vraiment à part (en sus d'une ou deux pulsions narcissiques refoulées). Il fut un temps où je pouvais prétendre faire partie de l'élite de la nation. J'y ai délibérément (?) renoncé. En revanche, je n'ai pas renoncé à une certaine forme de liberté. Un strapontin, fusse-t-il rugueux et sommaire, permet de s'éclipser de la salle à tout moment, tandis que celui qui est assis sur le trône en est bien souvent prisonnier. Fuck le prestige. Etre un quidam insignifiant qui dispute des petits tournois de poker pour une poignée d'euros au lieu d'être sous les feux de la rampe, ça a vraiment du bon.









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